Atelier VAD+

La gestion des eaux pluviales au service de l’adaptation au changement climatique

Rencontre des membres de VAD et du GRAIE #2

Evènement à l’initiative de la Communauté Aménagement des Territoires de VAD et du groupe Eaux Pluviales du GRAIE dans le cadre du partenariat entre le GRAIE et VAD.
Il s’agit ainsi d’un évènement réservé aux adhérents des deux structures.

Dans la continuité de la journée réalisée en novembre 2022, nouveau temps d’échange entre acteurs de l’eau et acteurs de l’aménagement s’est tenu le 14 juin. Cette journée était sous le signe du « décloisonnement » et de la transversalité entre acteurs de l’aménagement afin de répondre aux interrogations portant sur la gestion et le suivi dans le temps des ouvrages de gestion des eaux pluviales. Cela pose notamment la question du rôle de l’assistant à maîtrise d’usage et de l’animateur eau pluviale pour favoriser liens entre acteurs et la diffusion de la culture sur l’eau, les sols et le végétal.

Programme

  • 9h  : Accueil café
  • 9h30  : Brise-glace - 20’
  • 9h50  : Introduction de la journée – 10’
  • 10h  : Restitution mémoire de recherche des étudiants du master IWS de l’EUR H2O’Lyon (atelier participatif) - 2h
  • 12h  : Déjeuner (offert) - 1h30
  • 13h30  : Visite à proximité en lien avec la stratégie ville perméable de la Métropole – 1h
  • 14h30  : Partage REX par les participants - 30’
  • 15h  : Table ronde « gestion des EP et jeux d’acteurs : passer du silo au résEAU »
  • 16h30  : Conclusion avec propositions d’idées sur actions VAD/GRAIE – 30’

La matinée s’est ouverte sur la présentation des mémoires de stage des 4 étudiants encadrés par le GRAIE et VAD dans le cadre du Master IWS porté par H2O’Lyon. Cette présentation a pris la forme d’ateliers interactifs qui a permis aux participants de réagir aux hypothèses de recherche de chaque étudiant. Ces derniers avaient pour problématique commune : comment mieux intégrer la gestion des eaux pluviales dans le processus d’aménagement ? Il s’agit d’une question sur laquelle travaillent conjointement les groupes de travail du GRAIE et de VAD. Chaque étudiant portant une discipline différente (génie civil, écologie, microbiologie et géographie), ils ont formulé des hypothèses de recherche afin d’explorer un axe de réponse à cette vaste question.

La synthèse est également disponible en téléchargement ci-contre.

Synthèse des ateliers Atelier

Synthèse des ateliers
Atelier 1 avec Etienne Pujos, étudiant en microbiologie.

  • Problématique : Comment penser la gestion de l’eau au regard de la variété d’espaces urbains et de leurs impacts sur la biodiversité ?
  • Synthèse des échanges : la contrainte principale pour l’installation d’un ouvrage de gestion des eaux pluviales résulte des usages et non de l’impact sur la biodiversité. Le choix d’un ouvrage repose, en définitive, sur les retours d’expérience. Ainsi, travailler sur les impacts d’un espace urbain sur la biodiversité revient à travailler sur la relation des usagers à leur environnement. Cela peut se traduire par traiter les rejets des usagers à la source redonnant de la visibilité au cycle de l’eau.
    Atelier 2 avec Fanny Bourgeau, étudiante en géographie
  • Problématique : La participation citoyenne est-elle possible et désirable dans des projets d’aménagement pour la gestion de l’eau ?
  • Synthèse des échanges : De nombreuses questions ont émergé des discussions : Faut-il impliquer systématiquement les usagers sur tous les projets ? Est-ce un objectif vers lequel tendre ? Quand faire intervenir et comment ? Plusieurs bénéfices ont été rapidement identifiés autour de la participation citoyenne en lien avec des ouvrages de gestion des eaux pluviales : permettre l’appropriation et favoriser le bon entretien des ouvrages ou la non-détérioration. Ce faisant cela soulève toutefois la question de savoir si le sujet va vraiment intéresser le grand public.
    Atelier 3 avec Louise Evin, étudiante en écologie
  • Problématique : Comment faire évoluer un ouvrage de gestion des EP avec l’ouvrage de Porte des Alpes ?
  • Synthèse des échanges : plusieurs pistes d’évolution de l’ouvrage sont ressorties des échanges parmi lesquelles : renforcer la gestion multi-usage (à ce jour l’ouvrage comprend des espaces non utilisables), l’accompagnement à la transition de l’écosystème qui soit capable de supporter l’assèchement une partie du temps et l’accompagnement de la population pour accepter l’ouvrage comme un outil pédagogique par exemple sur la rareté de l’eau et sur comment composer avec les sécheresses à venir.
    Atelier 4 avec Miguel Alvarez Velasquez, étudiant en génie civil
  • Problématique : quel est l’outil idéal pour adapter nos villes au cycle de l’eau dans un contexte de changement climatique et d’urbanisation croissante ?
  • Synthèse des échanges : le principal besoin qui ressort face à la nécessité d’adaptation au changement climatique est bien évidemment le fait de pouvoir gérer la ressource en eau pour satisfaire les conditions d’habitabilité pour assurer la disponibilité en eau potable, le rafraichissement, la renaturation, la santé environnementale, mentale etc. Cela suppose à la fois des manques et des contradictions au sein du jeu d’acteur du processus d’aménagement (exemple : des enjeux et intérêts opposés entre production d’énergie et biodiversité) et des opportunités : favoriser la co-maitrise d’ouvrage, la mutualisation et la concertation. Sur la question des outils, le principal enjeu reste la sensibilisation des acteurs car sans un niveau suffisant d’information sur les enjeux de la gestion de l’eau, aucun outil ne sera efficace. La sensibilisation doit s’opérer à différentes échelles : enfants, décideurs, professionnels de l’aménagement et surtout, sortir du fonctionnement en silos.

Restitution de la table ronde

Intervenants :

  • Florence Dunod, Responsable cours nature, Ville de Lyon
  • Lucille Paulet, architecte et chargée de concertation, Robins des Villes
  • Valentin Deville, animateur eaux pluviales, SYSEG

Florence Dunod : pilote la phase programmation des cours nature et l’interface avec les usagers, la direction nature en ville et les assistants à maîtrise d’ouvrage (AMO) sur la partie concertation. Le dispositif cour nature a trois principaux objectifs :

  • Favoriser le contact au quotidien des enfants à la nature, sensibiliser et permettre aux enseignants de disposer d’un support pédagogie de plein air ;
  • Diversifier les usages classiques de la cour d’école (avoir des espaces de jeux calmes, de manipulation etc.)
  • Développer la nature en ville, les espaces de fraicheur, améliorer le maintien de la biodiversité en ville et la gestion des eaux pluviales.
    Budget : 19,5M€ sur ce mandat (crèches + écoles)

Objectifs de désimperméabilisation au sein du dispositif cour nature : permettre la réutilisation des eaux pluviales pour les usages de la cour en jouant sur le nivellement de celle-ci. Exemple : installer des récupérateurs d’eau de pluie pour des petits potagers facilement utilisables par les enfants. Selon la taille de la cour et selon les attentes pédagogiques, rendre l’eau visible avec des noues, petites rivières sèches etc.

A ce jour aucun projet n’a encore été livré, les premiers sortiront cet été (2023). Cependant, des premiers projets pilotes avaient été réalisés dès 2021,toutefois ils n’ont pas suivi tout le processus des cours nature (concertation).
Budget de transformation d’une cour : difficile à dire parce que cela dépend de la surface des cours. Beaucoup de paramètres sont à prendre en compte (secteur patrimonial, sols pollués etc.). Exemple d’une cour de 800 m² : 400k€ de travaux + MOE + AMO. Une petite cour qui va être livrée cet été : 360k€ TTC.
Objectif de 30 à 50% de surface naturelle. La cour doit rester praticable pour les activités sportives.
Par ailleurs, le contrat métropolitain a pour objectif d’aboutir à 400ha désimperméabilisé d’ici la fin du mandat.

Lucille Paulet : Robins des Villes existe depuis 25 ans, l’association vise à rendre le cadre de vie plus écologique, plus inclusif et plus agréable. Robins des Villes fait partie des AMO concertation pour les cours nature (pour le 7e et le 8e arrondissement). Chaque prestataire a sa méthodologie. La phase de concertation prend entre 2 et 3 mois avec les usagers selon leurs disponibilités. La concertation se fait autant avec les adultes qu’avec les enfants. La concertation est aussi un moyen de sensibiliser sur les conséquences du réaménagement de la cour sur les habitudes et les manières de travailler. Les enjeux autour de la cour d’école sont multiples, au-delà de la végétalisation, il y a aussi l’enjeu de la mixité. Les adultes sollicités sont : l’équipe éducative, l’équipe du périscolaire et les agents de la ville (entretien, cantinier, services techniques…). La concertation est un processus riche en information que l’AMO se doit de synthétiser et traduire dans un plan programmatique le plus fidèle possible à la parole des usagers.

Valentin Deville SYSEG (Brignais) : chargé de mission de la stratégie eaux pluviales, il a la charge de la création de la stratégie, de la partager avec les élus et de la déployer auprès de toutes les communes du syndicat. Il doit également élaborer une stratégie de communication, d’accompagner les acteurs face à l’évolution de la réglementation et d’assurer la gouvernance de l’eau (assainissement collectif/non collectif et gestion des eaux pluviales pour les communes qui ont transféré la compétence au SYSEG). L’objectif est de fédérer les acteurs autour d’une nouvelle dynamique sur la gestion des eaux pluviales. Autrement dit pour un ouvrage de gestion des eaux pluviales, il s’agit de définir à qui appartient le patrimoine et qui va l’entretenir. Enfin, ses missions d’animation territoriale reposent sur la communication et la sensibilisation via des guides techniques et des guides pédagogiques. Mission d’ingénierie accompagnement MOE et MOA.

Question : quels sont les bénéfices de la facilitation ?

Lucille Paulet : la concertation permet en premier lieu d’éviter les « projets catalogues ». Exemple de la place Danton (visitée pendant la journée) : la concertation a permis de faire ressortir le besoin de déambuler et de rafraichissement, en revanche le besoin ou l’envie de s’assoir à une table n’étant pas ressorti, aucun aménagement n’a été fait en ce sens même si l’espace pouvait s’y prêter. Contraindre et forcer à utiliser un aménagement non souhaité ne marche pas. On pourrait penser que tous les projets cours nature vont se ressembler mais le contexte change à chaque fois et produit des projets très différents. C’est pourquoi il est primordial de travailler en amont avec les usagers pour définir un programme cohérent avec leurs attentes et besoins.
Combien de projets réalisés en cours nature ? les premières cours sortent cet été avec 2 écoles qui auront suivi tout le processus même si premiers projets qui en ont déjà un peu bénéficié.

Florence Dunod  : le fait de s’appuyer sur un AMO pour ce travail de concertation permet d’avoir des temps de sensibilisation et de pédagogie sur des questions essentielles, telles que : pourquoi fait-on ce projet ? Et d’avoir les bons mots pour chaque public. Cela permet également de faciliter l’appropriation par les usagers d’éléments techniques.

Valentin Deville  : la concertation inter-service et entre les collectivités demande du temps de travail néanmoins, on constate des bénéfices certains : mutualisation des coûts par la mutualisation des budgets entre services et par la co-maîtrise d’ouvrage. Cela assure la pérennité des ouvrages. Exemple : la requalification d’une grande avenue a demandé de réaliser beaucoup de tests de perméabilité, or ces tests sont très coûteux. La concertation a permis de mettre en place une co-maitrise d’ouvrage et que les prescriptions techniques du SYSEG soient prises en compte notamment pour réaliser davantage de tests de perméabilité. Prendre du temps en conception est primordial pour assurer le bon fonctionnement et ainsi éviter des surcoûts pendant la vie de l’ouvrage. Exemple des collecteurs d’eau de pluie sur la voirie qui débordent systématiquement lorsqu’ils ont été réalisés uniquement par les gestionnaires de voirie sans concertation. Ils pratiquent par habitude sans vraiment adapter au projet.

Question : quid de l’intensification des usages des cours d’école comme cela est prévu dans le cadre du programme cours oasis à Paris ?

Il s’agit d’une piste en cours de réflexion mais difficile à mener avec les usagers. Dans les concertations, le sujet peut être amené par le biais de l’usage et de l’entretien pendant l’été. Les projets de végétalisation engendrent déjà de gros changements parfois difficiles à vivre pour les équipes. L’ouverture de l’école au grand public peut être assez anxiogène et pose des questions d’entretien et de maintenance. Toutefois il s’agit d’une question qui sera de plus en plus présente dans les débats à venir en raison de la nécessité d’avoir des ilots de fraicheur supplémentaires en ville l’été. Cela suppose de faire évoluer les fiches de poste des agents d’entretien par exemple.

Question : comment s’est opérée la priorisation des cours d’école à rénover ?

La priorisation s’est appuyée sur une grille multicritères prenant en compte notamment l’équilibre entre arrondissement, l’urgence du besoin de rénovation pour des raisons de sécurité (revêtements abîmés, réseaux défaillants) ainsi que la motivation des équipes pédagogiques. Toutefois le critère de difficulté n’a pas été suffisament pris en compte ; ainsi la ville s’est retrouvée à devoir démarrer avec des projets très contraints (balmes, sols pollués, ABF etc.) ce qui n’est pas le plus évident lorsque l’on démarre un nouveau type de projet. La décision peut également être prise à l’opportunité de gros travaux prévus par la Direction de la construction sur la rénovation ou la restructuration d’une école.
Une fois la cour d’école choisie, la recherche de la déconnexion totale des eaux de toiture n’est pas systématique. Le premier objectif étant de récupérer l’eau qui tombe dans la cour sauf si création d’un préau, auquel cas, il y a une obligation réglementaire de récupérer l’eau de la nouvelle surface de toiture.

Un participant suggère l’idée d’évaluer la possibilité de déconnecter les eaux de toiture.
Retour d’expérience de Chalon-sur-Saône : la récupération des eaux de toiture n’a pas été évaluée non plus. La désimperméabilisation a été réalisée sur les points bas de la cour pour favoriser l’alimentation en eau des parties végétalisées. Il y a différentes façons d’aborder le projet. Dans ce cas précis, le coût des travaux est moins important que celui présenté par la Ville de Lyon (environ 100k€ pour une cour et 75% de financement de l’agence de l’eau).

Question : Quelles sont les difficultés rencontrées notamment vis-à-vis des représentations et des idées reçues sur la gestion de l’eau ?

Valentin Deville  : les idées préconçues à l’égard de la gestion EP peuvent être communes à tous ou spécifiques à certains acteurs du territoire. Le partage d’info et de retours d’expérience permet de donner des arguments pour encourage le changement de pratiques. Pour autant, des idées reçues exigent des données très pointues pour les contrer notamment face aux ingénieurs. La question est de savoir comment l’animateur EP d’un syndicat peut être légitime pour argumenter contre un BE. Idée reçue très rependue parmi les ingénieurs de voirie : « l’eau est l’ennemie n°1 de la voirie ». Le fait d’avoir suivi une formation pour les gestionnaires de voirie a permis de mieux comprendre leurs visions et d’être légitime pour leur avancer des arguments contradictoires et suffisamment convaincants.

Lucille Paulet  : exemple de réaction d’un agent d’entretien « on souffle et on soufflera ». La principale difficulté ce sont les adultes qui ne veulent pas changer leurs habitudes (ce qui est normal). Par conséquent, l’enjeu est de trouver les leviers qui facilitera le dialogue avec ces personnes. Les réticences s’expriment également par rapport aux risques pour la sécurité des enfants. Toutefois, l’expérience montre que les accidents n’arrivent pas. Montrer le décalage entre la croyance et la réalité permet d’apaiser le débat.

Florence Dunod : la difficulté se trouve également au niveau du dialogue au sein de la collectivité et face au discours du « on a toujours fait comme ça ». Par exemple, la première réaction de la direction de la santé face aux choix d’espèces à planter dans les cours a été très restrictive. Un travail a donc été mené entre les services afin d’aboutir à une liste d’espèces acceptables. Les craintes exprimées par les agents peuvent également être la représentation des craintes des parents. Or, le questionnaire envoyé à 15 écoles montre que les parents ayant des craintes vis-à-vis de la sécurité sont une minorité. Cependant c’est une minorité bruyante. Le questionnaire a permis de faire relativiser les agents. Il y aura toujours une part d’insatisfaction.
Question : avez-vous constaté une évolution dans les représentations ?
Lucille Paulet : les enfants apprécient énormément le contact avec l’eau et le végétal. Souvent, ils sont les premiers demandeurs d’apaisement grâce au végétal. Des enseignants aussi expriment ce besoin et d’autres pas du tout.

Valentin Deville  : depuis 2 ans et demi, les acteurs du territoire ont bien pris conscience du besoin de changement de paradigme. Valentin est ainsi davantage sollicité par les des différents publics pour des conseils au niveau organisationnel, financier et technique. Même les bureaux d’étude le contactent directement pour avoir un avis technique.

Votre contact : Claire Topin